Archives de Tag: requérant d’asile

Parcours d’un rescapé de la guerre des Balkans

dessin Mr AD

Mr A , 51 ans, célibataire est originaire du Kosovo. Il parle la langue bosniaque, il a eu une scolarité non aboutie.  Il a subi de graves violences morales et physiques pendant la guerre au KOSOVO en 1998 et 1999.  Insuffisant rénal, hémodialysé,  sa vie a été tellement difficile et cruelle que Pascale Lefuel, infirmière en dialyse aux Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG)  a présenté son histoire avec l’autorisation du patient, lors de la réunion annuelle des centres Romands de dialyse, en octobre 2015.

Les dramatiques violences qu’il a subies sont les amputations de la moitié des dix doigts, il ne peut plus tenir un crayon pour écrire, ni tenir correctement ses couverts pour se nourrir. Il a enduré de graves brûlures au visage et aux membres avec de lourdes séquelles cicatricielles. Il a supporté un « crush syndrome » et une rhabdomyolyse suite aux tortures.  Sa première hémodialyse date de 1998 au Kosovo, puis pendant 9 ans dans de terribles conditions. Il fuit et arrive en Suisse en décembre 2007. Grâce à un traducteur Bosniaque, il est conduit dans un centre de dialyse et dirigé vers le centre d’accueil de réfugiés à Kreuzlingen. Un mois plus tard il est transféré à Genève, dans un foyer.

carte Mr A

Beaucoup de tracas administratifs l’attendent. Un permis de séjour N pendant 2 ans, puis un permis F humanitaire dont il est toujours bénéficiaire à ce jour. il attend un permis B. Pris en charge en février 2008 en dialyse aux HUG,  il est suivi également par le Dr Subilia, médecin spécialisé dans les traumatismes post-guerre, avec un traducteur. Dans notre service de dialyse, heureusement, deux infirmières, Olgica Mitickangelovska et Mehdi Hoxha parlent sa langue, ce qui aide beaucoup. Ce syndrome de stress post-traumatique agit sur la personnalité de Mr A. Il fait des crises d’anxiété, son humeur est dépressive et il peut devenir agressif s’il se sent menacé. Il souffre de dénutrition en arrivant en Suisse après plusieurs mois de famine. Malgré toutes ces difficultés, il adhère bien au traitement, prend bien ses médicaments et se présente à toute ses séances de dialyse. Grâce à Olgica et Mehdi son adaptation dans notre équipe a été facilitée. Il a la volonté de communiquer et peu à peu se révèle gentil et jovial. Une relation de confiance se tisse avec toute l’équipe médicale et infirmière de notre centre. Il prend des cours de français rapidement stoppés, car il a trop de difficultés d’apprentissage et de concentration. Ses mutilations aux mains le mettent dans l’impossibilité d’écrire. Peu à peu il devient autonome, prend seul le bus pour se rendre en dialyse.

Malgré les contraintes inhérentes à la greffe rénale, il la privilégie à la dialyse qui ravive ses peurs. Il se soumet à tous les examens pré greffe et il est ensuite inscrit sur la liste d’attente de transplantation rénale. Il sera greffé le 9 septembre 2012 avec succès, à partir d’un don d’organe d’une personne décédée.

Le suivi médical post-greffe est assuré par le Dr Karine Hadaya, néphrologue responsable du service de transplantation rénale aux HUG. Olgica et Mehdi les deux infirmières qui parlent sa langue se relayent pour être présentes. Elles s’investissent pour l’aider à agencer tous ses rendez-vous médicaux, pour l’informer des modifications de traitement. Elles sont à son écoute avec beaucoup de disponibilité.  Mr A est très reconnaissant à la Suisse, aux HUG, à toute l’équipe de dialyse et de transplantation. Il pleure d’émotion quand il tient à nous remercier.

L’ histoire de vie de Mr A se termine bien, après 10 ans de souffrance. Pour nous soignants, c’est aussi valorisant et gratifiant de revenir sur son parcours de rescapé d’une vilaine guerre et de pouvoir se dire que nous avons vraiment aidé cet homme. Ainsi, pour cela, c’est nous qui le remercions de donner un sens à notre métier d’infirmière ou de médecin.

Aujourd’hui, en 2016, Mr A a retrouvé son autonomie, il vit seul dans un appartement, ses repas sont livrés chaque jour et une infirmière à domicile vient le voir 4 fois par semaine.

Une fois par semaine, un Genevois retraité l’emmène marcher en montagne, lui offre un repas et lui apporte assistance. Il est devenu son ami.

Mehdi, Mr A et Olgica

Mehdi, Mr A et Olgica devant la fresque des HUG.

Source image début texte:  http://blogs.mondomix.com/samarra.php/2013/01/05/yougoslavie-

Poster un commentaire

Classé dans Dialyse, Transplantation

Parcours d’un migrant atteint d’insuffisance rénale terminale

berger

A l’occasion de  la journée Romande de Néphrologie plusieurs infirmières du service de dialyse des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) ont présenté chacune l’itinéraire d’une personne arrivant d’un pays lointain.

Daniela Ghafry, nous a exposé la trajectoire de Monsieur X. Ce jeune homme de 24 ans est originaire de Gambie. Il n’a pas été scolarisé, il est analphabète. Avant de quitter la Gambie, il était paysan et s’occupait d’un troupeau de vaches. De langue maternelle Peul, il parle un peu l’espagnol, un peu l’anglais et connait quelques mots de Français.

Carte_GAMBIE Son insuffisance rénale est d’origine indéterminée avec une diurèse conservée. Sa maladie a débuté avec des dyspnées (difficultés respiratoires) des œdèmes aux jambes et une hypertension artérielle sévère. Il a commencé les dialyses en urgences en 2007 à l’Hôpital de Banjul en Gambie avec une fistule artério-veineuse (FAV) au bras gauche. Il a été dialysé pendant plus d’une année puis il a arrêté par manque de moyens financiers. Il quitte la Gambie en 2008.

Sans titre

Vallorbe

Le centre d’enregistrement et de procédure de Vallorbe a été inauguré en 2001

Mr. X arrive seul à Vallorbe au centre d’enregistrement pour requérant d’asile en juillet 2010 et dépose une demande d’asile. Il dit ne pas avoir été dialysé depuis 1 année. Il bénéficiera de ses premières dialyses en Suisse à l’Hôpital d’Yverdon.  Il répète sans cesse qu’il veut retourner dans son pays. Il est ensuite transféré à Genève dans un foyer et adressé aux HUG pour poursuivre ses dialyses dès  juillet 2010. Il voudrait trouver une ONG, une Association ou une Fondation qui financerait ses dialyses en Gambie. La somme lui permettrait d’acheter des vaches et le revenu obtenu de celles-ci, de payer son traitement. Il se présente irrégulièrement à ses séances, refuse de s’y rendre pour faire pression afin de pouvoir  rentrer dans son pays.

Il est informé à maintes reprises avec l’aide d’interprètes des dangers encourus pour sa santé s’il maintenait sa décision de rentrer prématurément. Des rencontres ont eu lieu avec des interprètes et des personnes  travaillant pour le Service Au Retour (SAR). Vu son insistance et sa détermination, des démarches sont organisées pour son retour à condition qu’il s’engage à poursuivre  ses séances de dialyses.

Banjul

Royal Victoria Teaching Hospital, Banjul

En Gambie, l’assurance d’une prise en charge de ses dialyses n’est pas garantie, il n’y a que 4 postes de dialyse à l’hôpital de Banjul et ils sont tous occupés. Une première date de retour est fixée puis reportée car il manque encore un document à son dossier. Mr X est tellement déçu qu’il fait même une tentative de suicide médicamenteux. Il reste brièvement aux soins intensifs, puis quelques jours en psychiatrie. Malheureusement sa fistule se bouche, elle s’est thrombosée suite à une contention de la part de la sécurité à l’hôpital  lorsqu’il était agité. Après négociations, il accepte une désobstruction de sa FAV en radiologie interventionnelle, mais c’est l’échec. Il refuse  la pose d’un cathéter de dialyse. Il signe une décharge et déclare qu’il est informé du risque de mourir s’il n’accepte pas les soins. Il maintient de sa décision de rentrer dans son pays.

250px-IOM-OIM.svg

 

Finalement le retour est organisé par le SAR avec l’intervention aussi de l’OIM (Organisation Internationale pour les Migrations)

Zarzis Port 19 march 2015

L’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) assure via son expertise une assistance au retour et à la réception des migrants de retour dans leur pays. Image: tunisia.iom.int

Départ pour la Gambie le 25 novembre 2010 Il est parti avec 3 mois de traitement médicamenteux et une somme d’argent. C’est la première fois de sa vie qu’il prend l’avion. Il est accueilli  en Gambie par l’IOM. Il rentre dans son village. Il achète 7 vaches et 1 bœuf et commence à travailler mais sa maladie est là. il n’ira jamais à Banjul faire ses dialyses. Il décède quelques mois plus tard. Il avait 25 ans.

 

Remerciements à Laurinda Rodrigues, aide soignante en hémodialyse aux HUG pour son aide dans les recherches sur l’itinéraire et la vie de Mr X

Le film « La forteresse » montre la vie des requérants d’asile au centre d’hébergement de Vallorbe: voir article précédent.

Image: Carte de l’Afrique  badalabougouka.mondoblog.org

Image: Carte  de La Gambie www.1clic1planet.com

Photo Vallorbe : www.24heures.ch

Photo de Franck Boyer:  Berger Peul et son troupeau de vaches en Gambie: www.kamikazz-photo.com

Photo Hôpital de Banjul en Gambie: drexelweserve.blogspot.com

https://www.iom.int/fr

Photo IOM: tunisia.iom.int

 

 

Poster un commentaire

Classé dans Dialyse, Ethique

Vallorbe, la forteresse

forteresse« La forteresse » est un film,  de Fernand Melgar, qui traite du sujet des requérants d’asiles en Suisse et des conditions, dans lesquels ceux-ci vivent en attendant l’acceptation de leur statut ou leur renvoi. Le réalisateur nous plonge avec émotion dans un centre pour requérants en attente dans la petite ville vaudoise de Vallorbe. Les requérants sont ballotés en attendant entre doute et espoir que l’État décide de leur sort. Des femmes, des hommes et des enfants, Roms, Togolais, Géorgiens, Kosovars ou Colombiens, affluent chaque semaine aux portes de la Suisse. Ils fuient la guerre, la dictature, les persécutions ou les déséquilibres climatiques et économiques. Après un voyage souvent effectué au péril de leur vie, ils sont dirigés vers l’un des cinq Centres d’enregistrement et de procédure, Vallorbe.

En face, des hommes et des femmes, d’origines diverses eux aussi, gèrent l’accueil des requérants et leur séjour. C’est à eux qu’incombe la lourde tâche d’appliquer la loi  en matière d’asile et de décider du bien-fondé des demandes.

La journée Romande de Néphrologie a eu lieu le jeudi 8 octobre à Genève. Plus de 100 personnes, Néphrologues, infirmiers, aides-soignants sont venues de toute la Suisse Romande pour réfléchir, nous les soignants de dialyse, à l’accueil que nous réservons à ces personnes en insuffisance rénale sévère, dialysées, qui quittent leurs pays pour différentes et multiples raisons. Il leur faut survivre…Pour voir le film, aller directement en fin de cet article et cliquer sur l’image.

vallorbe

photo: youth.amnesty.ch

LA FORTERESSE nous plonge au cœur de ce tri quotidien d’êtres humains. Une démarche inédite, qui saisit sur le vif et avec un profond respect des bribes de destins, des échanges forts qui marquent la vie du Centre. Avec une densité narrative proche de la fiction, le film suit ses «personnages» dans leur douleur, leur incertitude et leur joie. Inévitablement, le film pose la question du rapport que l’on entretient à l’autre en tant que citoyen, mais surtout en tant qu’être humain.

Le DIP (Département de l’Instruction Publique)  à Genève a octroyé une aide financière pour la réalisation de DVD du film La forteresse de Fernand Melgar et d’un dossier pédagogique destinés aux enseignant-e-s.

La forteresse, qui a reçu un Léopard d’or au Festival de Locarno en 2008, raconte trois mois de la vie au Centre d’enregistrement et de procédure pour requérants d’asile de Vallorbe.
Le film et le dossier pédagogique qui l’accompagne constituent une opportunité d’aborder en classe des thèmes tels que le racisme, le droit d’asile, l’immigration, la cohabitation entre individus d’horizons très divers.

Pour voir le film: :  https://www.youtube.com/watch?v=2Jnx9veezzg


Documentaire | 2008 | Suisse | 100′ | V.O. française avec s-t english, deutsch, italiano
Réalisation Fernand Melgar | image Camille Cottagnoud | son Marc von Stürler | montage Karine Sudan | collaboration scientifique Alice Sala | collaboration au scénario et montage Claude Muret | graphisme Janka Rahm | conseil et transcription Alex Mayenfisch | étalonnage Patrick Lindenmaier | montage son Alexander Miesch | mixage Denis Séchaud | technique video Joseph Meizer, Daniel Wyss | production déléguée Fernand Melgar | production exécutive Stéphane Goël | comptabilité Gianni de Francesco | production Climage

en coproduction avec Télévision Suisse Romande, unité documentaire, Irène Challand, Gaspard Lamunière | Télévision Suisse Italienne, Luisella Realini | SSR SRG idée suisse, Alberto Chollet | ARTE G.E.I.E. unité documentaire, Christian Cools | avec le soutien de Office Fédéral de la culture (DFI), Suisse | Fondation Vaudoise pour le Cinéma | Fonds Régio Films | Succès Cinéma | Succès Passage Antenne | avec la participation de RTBF, Claire Colart

Tourné au Centre d’enregistrement et de procédure de Vallorbe de l’Office fédéral des migrations, Suisse du 3 décembre 2007 au 15 février 2008

Sources: L’article est entièrement inspiré du site http://climage.ch/films/la-forteresse/

http://www.ge.ch/dip/GestionContenu/detail.asp?mod=publication.html&id=1315

https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Forteresse_(film,_2008)

2 Commentaires

Classé dans Ethique